Björk - Debut
Musique / Critique - écrit par Kassad, le 13/12/2003 (Tags : bjork album debut version that one tplp
Björk Gudmundsdottir est née en 1965 à Reykjavik dans une communauté hippie. Elle a un point commun avec Michael Jackson : dès son plus jeune âge elle fait partie du show-business (premier enregistrement à onze ans, premier album à treize avec certaines de ses propres compositions). C'est bien le seul car il s'agit d'une femme islandaise pratiquant une musique qui ne se soucie pas des modes et des formats habituels. Après avoir participé à de nombreux groupes (dont les Sugarcubes) de tous styles (du folklore islandais au punk tout en passant par la petite formation jazz) Bjork décide qu'elle est grande et en sait suffisamment pour se lancer seule. Nous sommes en 1993 l'album Debut explose en douceur. Il s'agit d'un véritable Objet Musical Non Identifié pour l'époque et il le reste dans une certaine mesure (même si de part son aura Björk a fait beaucoup d'émules).
C'est en me promenant dans les rayons d'un disquaire de San Francisco que j'ai eu mon premier contact avec Björk. En voyant la pochette j'ai véritablement flashé et je n'ai pas pu résister, j'ai dû l'acheter même si je n'avais aucune idée de ce qu'il contenait. Subjugué est bien le terme qui convient. C'est aussi celui qu'il faut pour décrire ma première écoute (première d'une longue longue série toujours d'actualité d'ailleurs) de Debut. La première chose qui saute aux oreilles est que Björk a un son bien à elle. Dans un premier temps vous avez du mal à le définir mais vous êtes déjà sûr que si vous entendez un autre titre de cette artiste vous saurez la reconnaître. La voix tout d'abord. Imaginez ce que serait la voix d'une enfant mais avec la puissance d'une chanteuse comme Aretha Franklin. Une voix qui par moments (comme dans Big Time Sensuality) s'envole dans le ciel mais qui est aussi capable de communiquer une détermination féroce (Violently Happy).
Cet album est un mélange de styles qui vont de l'électro pop avec prédominance de synthétiseurs (pas de sample : ça n'existait pour ainsi dire pas à cette époque) et boîtes à rythmes (Violently Happy, There's more to life than this), à des morceaux purements instrumentaux (par exemple le somptueux Like someone in love avec juste une harpe) voire une utilisation d'instruments traditionnels islandais (The Anchor Song). De la même manière les morceaux vont du "tube" qu'on imagine sans peines en boîte (There's more to life than this) à des morceaux beaucoup plus "avant-guardistes" (les accords dissonants d'Aeroplane et The Anchor Song notamment). Quand je prends un peu de recul pour considérer cet album, je me dis que c'est un miracle qu'il ait été produit. Il est si loin des produits formatés actuels que je vois mal les maisons de disques actuelles, qui se complaisent dans les rééditions de remix de best-of, se compromettre à lancer un tel disque (pratiquement indiffusable en radio et d'ailleurs indiffusé à l'époque)...
Mais voilà, le temps a rendu son jugement. Debut est sorti il y a maintenant dix ans. Dix ans que j'écoute cet album (je suis en train de le faire en rédigeant cette critique) et que je continue d'y trouver de nouvelles choses. Pendant ces dix années j'ai passé je ne sais combien de temps à réviser mes partiels, ou plus simplement à rêver les yeux ouverts en écoutant Björk. La magie opère à chaque fois. Dix ans : c'est suffisament impressionant pour que j'attribue le premier 10 de ma (courte) carrière de critique. Je vous conseille ce petit test : parmi tous vos CD, à votre avis, quels sont ceux que vous aurez encore envie d'entendre en 2013 ? Moi je sais que Debut en fera partie, pour les autres...