7/10Oedipe - Amaeru

/ Critique - écrit par Filipe, le 31/08/2005
Notre verdict : 7/10 - Une fraction de folie ! (Fiche technique)

Tags : oedipe amaeru auteur adrien theatre tirel moreau

Ils ne sont alors que de jeunes montpelliérains sans histoire, lorsqu'ils font parler d'eux pour la première fois, aux alentours de 1996, à l'occasion d'une première tournée. Il est vrai qu'avec leur musique rock teintée de métal hardcore aux textes poétiques et sensibles, ils ont là bien assez de matière pour se distinguer. Ce n'est certainement pas un hasard si les jeunes artistes remportent le septième Tremplin de Musiques Actuelles en 2001. Dans la foulée, ils s'associent au Rassemblement des Associations Kulturelles et Artistiques Nîmoises (RAKAN), qui depuis apporte son soutien au groupe. En 2002, ce dernier enregistre donc un premier album, qu'il choisit d'intituler Elisa. Ce disque leur ouvre les portes du tremplin régional des découvertes du Printemps de Bourges 2003. Un an plus tard, les quatre compères optent pour l'enregistrement d'un maxi (Le Lien) et entament une nouvelle tournée, ce qui leur vaut d'être sélectionnés pour le Tremplin Révélation RTL2 de cette année. Rien que ça.

Tout est question d'alternances chez eux. Ils ne sont pas assez méchants pour que l'on puisse décemment les considérer comme un groupe de métal s'affirmant au fil des ans. Les qualifier de formation "pop/rock" me semble également mal à propos. S'obstiner à vouloir à tout prix leur attribuer la moindre petite étiquette n'est certainement pas la solution la plus opportune en fin de compte, lorsque l'on souhaite évoquer leur parcours. Un guitariste passablement énervé, un bassiste qui refuse de jouer les faire-valoir et un artiste de "variété métal", pour quelques belles mélodies empreintes de nostalgie, entrecoupées ici ou là de véritables déflagrations : voilà qui pourrait éventuellement faire office d'empreinte commerciale. Ces montpelliérains-là sont encore jeunes et ils n'hésitent pas à l'affirmer à travers leurs chansons, en prenant le temps d'installer des ambiances personnelles tout en se jouant des règles pré-établies. Les membres du groupe Oedipe persistent à vouloir faire cohabiter chanson française et métal. Les passages les plus tendres (Amaeru, Libre...) succèdent aux plus exaltés (Ames Perdues, Contre Moi...), et le soin apporté à l'instrumentation ne fait que renforcer cette impression de variété musicale. Le calme et la tempête se disputent la suprématie et les quatre fantastiques ont égaré leur baromètre.

Leur premier album, Elisa, nous mettait aux prises avec une jeune femme en proie à ses démons intérieurs. Le second est tout aussi abstrait, entre ses moments de bonheur, ses instants de bon air, ses relations intenses et ses infinies délivrances. Je n'irai pas jusqu'à parler de textes porteurs de réflexion autour des rapports hommes/femmes ou bien du don de la vie, mais les paroles de leurs chansons contribuent activement à la personnalisation de leur répertoire et l'affirmation de leur style musical. En outre, cet album est l'occasion d'apprendre le sens du mot "amaeru" : fondement essentiel de l'esprit japonais, le terme désigne le fort sentiment de dépendance affective que l'on peut ressentir pour une personne, particulièrement celui unissant le nourrisson à sa mère. Autre explication possible : Amaeru, c'est comme un baiser volé sur un carré de peau... Amaeru, c'est comme être sûr d'avoir l'être qu'il te faut... Amaeru, me voir dans tes yeux comme un homme... Amaeru, je n'ai plus d'autres envies que d'être dans ta peau... Fin de citation.

A la manière dont ils tournent le dos aux principes et se jouent des étiquettes, en choisissant de mettre en chanson absolument tout ce qui leur passe par la tête, à leur Terre Promise, leur Futile et leur Amaeru, je vois en Bastien Talma, Laurent Granier, Fred Moreau et Adrien Tirel quatre garçons pleins d'avenir. Leur album Amaeru présente bien quelques défauts de jeunesse, le plus marquant étant à coup sûr ce chant, qui tourne un peu trop souvent à la caricature. Mais les défauts ne nous rendent-ils pas un peu plus humains, en fin de compte ? Et puis, comme dirait l'autre, il faut bien que jeunesse se fasse, après tout. Elle n'est qu'une simple fraction de folie. Puissance, émotion et profondeur définissent leur univers. Oedipe est, à coup sûr, un groupe à vivre.


01. Terre Promise
02. Gravites
03. Futile
04. Mon Automne
05. Ames perdues
06. Amaeru
07. Pardonne-moi
08. Le Lien
09. Contre moi
10. Libre
11. Marquise
12. Le Reflet