7/10James (Kery) - Ma Vérité

/ Critique - écrit par Toma, le 24/12/2005
Notre verdict : 7/10 - Ma Vérité (Fiche technique)

Il y a 4 ans Kery James sortait un monument du rap, un album à l'opposé de ce que le rap tant à être aujourd'hui. Face à un matérialisme toujours plus présent, Kery James larguait Si c'était à refaire, recueil d'un homme reconverti à l'islam avec un discours mille fois plus sage que ne l'était celui de son groupe mythique Ideal J. Cet album, confirma alors Kery James comme pilier du hip-hop français, lui collant même l'étiquette du rapper repenti, du rappeur sage français. Il sera également (forcément) critiqué, parfois de trop mettre en avant sa reconversion à l'islam, parfois d'être un peu trop « gentillet ». Ignorant ses critiques, il continuera à prêcher sa nouvelle bonne parole lors de diverses conférences ou avec son projet musical à but caritatif Savoir vivre ensemble, double album réunissant une grande partie de rappers français.

Un nouveau solo de Kery James ne pouvait donc être que grandement attendu, par les passionnés d'un coté et par les détracteurs de l'autre. Il revient donc avec un Ma vérité plus musclé, plus agressif, bref plus Kery James d'Ideal J. Le fond pourtant reste le même, son envie de livrer un rap conscient intacte.

Il attaque avec un superbe J'aurais pu dire, envoyant tous ses détracteurs au tapis sans pour autant tomber dans une vulgaire réponse. Sa manière de présenter ce qu'il aurait pu dire, sans le dire mais en le disant quand même (si vous ne me suivez pas écouté le morceau ce sera sans doute plus simple) offre une critique acerbe d'un certain genre rap actuel. Oui il aurait pu dire beaucoup de choses pour vendre plus, prôner la violence, tout remettre la faute sur le gouvernement : J'aurais pu dire toutes ces conneries, Mais dans nos rues y a trop d'pleures et y a trop d'cris.

Avec Les Miens, posé sur le superbe sample Shook ones de Mobb Deep, il milite pour les siens, pour ces nombreuses personnes de banlieues, pour ces français pourtant étrangers en France. Car si dans ces banlieues parait-il à nettoyer au kärcher, certes il y a des dealers, des braqueurs, mais aussi un grand nombre de personnes qui ne demandent qu'à vivre en paix. Il pousse un gros coup de gueule contre tous ces talents cachés transformés en talent gâchés, triste de voir une partie des siens être finalement devenu l'étiquette que les médias leur ont collée depuis toujours.

Dans un autre registre, mais toujours en utilisant un sample ultra connu, Kery James se risque sur Mes rêves à une reprise de Sweet Dreams d'Eurythmics. Pour ajouter encore un peu de surprise, Amel Bent, une ex-« La nouvelle star », l'accompagne sur le morceau. Le texte est plutôt léger mais la performance de Kery James est originale et réussie. Le résultat est finalement agréable à écouter. Pour les fans d'Amel Bent, il ne faudra par contre pas s'attendre à une très grande participation de sa part, seulement cantonnée à chantouiller le refrain.

Niveau featuring on retrouve Diam's qui fait une apparition moyenne sur Ma sincérité, et OGB, pour le cri de guerre de la Mafia k'1 fry Jusqu'au bout. Le featuring le plus attendu, était très certainement celui de la version 2005 du très célèbre Hardcore. Iron Sy, membre du B.O.S.S. a donc été l'heureux élu de cette version revisitée, pour hurler le répétitif mais puissant « Hardcore ». Agrémentée de faits historiques plus récents (pardonné le paradoxe) ce Hardcore 2005 est certainement beaucoup plus renseigné et plus précis mais bien moins puissant que sa version précédente. Kery James ne comptais de toutes façons pas en faire son single phare comme Hardcore l'avait été pour l'album Le combat continu d'Ideal J.

Dans un registre plus Si c'était à refaire on trouve des titres plus parlé que chanté et plus chanté que rappé : En Feu de détresse, Combien et La vie c'est livrent les pensées, les réflexions, les peurs de Kery James en particulier la peur de lui-même. Tout le monde se retrouvera donc forcément dans ces textes poignants, même si le refrain de Combien donne tout simplement envie de passer la chanson...

Plusieurs morceaux contribuent à faire de cet album un opus très diversifié, un Universel très reggae, Ghetto pour la description sympathique de ce qu'est la « ghetto super classe », et puis surtout C'est votre choix pour une critique encore une fois délirante de la télé-réalité et autres émissions « Bataille & Fontaine » spirit.


Alors, que dire de cet album ? Il est très certainement plus varié que son prédécesseur. Kery James s'applique à se produire avec des flows très différents, sur des instrumentaux eux aussi très divers et originaux. Certains morceaux, même si ils présentent parfois une certaine originalité, n'ont cependant pas vraiment, à mon avis, leurs places sur cet album, laissant un peu l'image d'un opus trop diversifié. Il renferme cependant d'excellents titres, notamment J'aurais pu dire et Les miens qui deviendront sans aucun doute de nouvelles références du rap français.