Interview de Koji Asano

/ Interview - écrit par wqw..., le 23/09/2007

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Interview de ce japonais qui a depuis 1995 sorti plus d’une quarantaine d’albums entre musique expérimentale, minimalisme contemporain, musique concrète et musique classique. 

Koji Asano (par Kaori Takahashi)
Koji Asano (par Kaori Takahashi)
Koji Asano fait un peu figure de personnage atypique sur la scène musicale internationale, pour ne pas dire un doux dingue de la composition. En effet, ce japonais, exilé un temps à Londres puis à Barcelone, a depuis 1995 et du haut de ces trente-deux ans déjà sorti plus d’une quarantaine d’albums entre musique électronique expérimentale, minimalisme contemporain et musique concrète. Hors depuis 2002, il a commencé également à composer pour des ensembles classiques. Avec ces dernières sorties, il était largement temps de nous entretenir avec lui.

Malgré ta productivité, tu restes connu en France d’un public relativement confidentiel. Pourrais-tu nous présenter ton travail ?
Je suis un compositeur japonais. Je travaille principalement à la composition de musique pour instruments classiques et sons électroniques. Je tourne en solo pour des performances live en Europe ainsi qu’au Japon. Je ne suis pas très célèbre mais pas seulement en France, à peu prêt partout y compris au Japon. Je suis un artiste internationalement limité.

Koji Asano at work
Koji Asano at work
Comment t’es venu cette passion pour le son, l’électroacoustique et l’électronique ?
Quand j’étais enfant, j’aimais beaucoup regarder le ciel la nuit, les étoiles, les planètes et la lune avec un télescope ou des jumelles. Une nuit, j’ai soudain réalisé que les étoiles et tout le reste étaient tellement libres. Alors j’ai pensé que je devais être libre comme elles parce que je suis moi aussi dans l’univers, comme l’un de ses éléments.

Est-ce que certains artistes t’ont influencé plus ou moins directement à tes débuts ? Comment te situerais-tu aujourd'hui par rapport à eux ?
Pas vraiment, et plus spécialement lorsque j’ai commencé. La grande influence était l’astronomie et le ciel étoilé dont je te parlais. Quand j’étais adolescent j’écoutais beaucoup Prince. Je n’avais pas vraiment d’espoir lorsque j’ai commencé. Disons que je ne comprenais pas où j’allais mais je savais que chaque nouvelle composition m’emmenait vers un nouvel endroit. Alors j’ai beaucoup composé. Après de nombreuses années de composition, j’ai découvert que je prenais le chemin pour composer une symphonie.

Koji Asano (par Reiko Asano)
Koji Asano (par Reiko Asano)
L’année 2004, a été pour toi une année de rupture. Un retour au Japon, des concerts, un élargissement de ton travail. Peux-tu nous en dire plus ?
En raison de la diversification et de l’universalisation de mon travail, j’ai du repartir au Japon. J’ai finalement senti que je pouvais composer n’importe où. Ces années à Barcelone ont été assez importantes pour moi, une vraie nécessité.

Si 2005 a été chargé avec cinq nouvelles sorties, 2006 a réservé sont lots de surprises puisque tu as proposé trois œuvres ‘classiques’. Comment en es-tu venu à ce type de composition ? Est-ce quelque chose dont tu avais envie depuis longtemps ?
En 1999, j’ai sorti Flow-Augment / Koji Asano Ensemble qui était déjà de la musique classique. Ça n’est donc pas la première fois. Quand j’avais treize ans,  j’ai commencé à composer au piano. J’ai donc simplement l’habitude de composer avec des instruments classiques, avec des partitions. C’est ainsi que j’ai fait Violin and Viola Suites, Baroque Ensemble et Trio Suites. Je voulais vraiment écrire ces pièces et j’avais en plus rencontré quelques très bons interprètes. Oui, je voulais faire ça depuis longtemps mais je n’avais pas encore rencontré les bons artistes.

Comment élabores-tu ton travail, tes pièces musicales ?
Je me lève à 4h00 du matin – 5h00 en hiver – et je compose jusqu’à 7h00. C’est tout. Si je n’arrive pas à me lever à cette heure là, je ne compose pas. Le matin est assez calme, même les oiseaux et mon enfant de deux ans dorment encore. Je peux me concentrer. J’aime le ciel du matin, la lumière du soleil venant d’un angle faible, cette légère clarté bleue dans cette profonde obscurité, parfois la pluie. La pluie du matin c’est un peu de solitude. C’est comme si personne ne se rendait compte de la pluie.

Koji Asano (par Reiko Nakada)
Koji Asano (par Reiko Nakada)
Tu sembles ultra-prolifique est-ce que c’est aussi simple que cela ? Est-ce que tout ce que tu fais devient un album pour Solstice ?
Il y quelques sorties sur un label mp3, Seven Things (plus d’info ici). Etre prolifique est assez naturel pour moi. Je ne me force pas à composer ou je n’essaye pas d’être prolifique. C’est juste naturel, je compose à peu prêt tous les jours. Parfois j’arrête de composer pour laisser les idées grandir. C’est tellement cool de composer. La meilleur chose que j’ai appris de la course à pied est "garde ton rythme", même si tu vois d’autres gens courir bien plus vite ou bien plus lentement, ce que tu as à faire c’est connaître tes capacités, et garder ta vitesse, parce que pour chacun la manière d’atteindre un but est différente. Je me fiche du nombre de sorties.

Est-ce qu’il est plus simple pour toi de tout gérer (composition, production, distribution) ? Ne serait-il pas plus simple aujourd'hui de ne plus te consacrer qu’à la composition ?
Ça n’est pas si simple mais de nos jours avec les ordinateurs et Internet, il n’y a pas tant de choses à faire. En plus mon label c’est seulement moi. Il n’y a pas d’autres artistes à manager donc les autres parties me plaisent aussi.

Es-tu sensible au travail d’artistes en particulier en ce moment ?
En ce moment, je ne suis pas très intéressé par les autres artistes. Mais quand je joue lors d’un festival, j’aime beaucoup les autres concerts. J’aime beaucoup Mahler et Lorin Maazel. Récemment j’écoute Ton Koopman. C’est incroyable. Bien entendu, j’apprends d’autres artistes mais, comparé à ce que je trouve dans ma vie et en moi, ça n’est qu’une petite partie. Peut-être que je peux apprendre des techniques des autres artistes mais seulement techniquement, en surface, une partie relativement limitée. Cette chose importante dont tu as besoin pour composer est dans ma vie. Je dois simplement la regarder calmement et l’attraper quand je me débats sur une composition. C’est de toute façon une activité assez personnelle. Je veux dire la composition. Parce que la musique est juste comme la vie elle-même. Alors je dirais qu’il n’y a pas vraiment d’influence de style ou d’idées d’autres artistes, mais je reçois quelque chose d’important de Mahler, quelque chose qui n’est pas musical. C’est vraiment plus à propos de la vie que de la musique.

Koji Asano (par Reiko Asano)
Koji Asano (par Reiko Asano)
As-tu encore beaucoup de choses cachées dans tes travaux de jeunesse ? En feras-tu profiter le public ?
J’ai composé pas mal de choses dans mes jeunes années, entre mes 17 et 21 ans, jusqu’à la sortie de mon premier album sur Solstice. Ces dernières années j’ai compilé quelques pièces importantes et les ai remasterisées en Collection Vol.1 (The Giant Squid) et Vol.2 (Final Insurance). Malheureusement il n’est pas prévu de volume 3 parce que mes autres travaux sont nuls. Les écouter est une simple perte de temps. Malgré tout, ces œuvres de jeunesse m’encouragent toujours. Je ne les écoute pas mais elles existent comme une preuve de ce que j’ai fait à cette époque pour avancer en tant que compositeur.

Peux-tu nous dire ce que tu as prévu pour 2007 ? Vas-tu encore nous surprendre ?
Cette année, j’ai prévu de composer, d’enregistrer et de sortir quelques projets, comme des pièces pour violon solo avec un très bon violoniste, des sonates pour violon alto et des quatuors à cordes. Essentiellement des choses avec des musiciens classiques. Je ne crois pas à la surprise en matière de sortie de disque. Peut-être que faire de la musique avec des musiciens classiques peut être une surprise si tu n’as jamais entendu que de la musique électronique ou des groupes à guitares. J’essaye juste d’être toujours meilleur à chacune de mes compositions. Je prévois d’écrire une symphonie dans le futur.