The Delano Orchestra - A Little Girl, a Little Boy, and All the Snails They Have Drawn
Musique / Critique - écrit par Danorah, le 20/02/2008 (Un petit plaisir plein de douceur à s'auto-prescrire pour s'isoler, l'espace d'un instant, des innombrables tracas que recèle ce monde de brutes.
Certains groupes choisissent des noms très compliqués, et intitulent leurs albums avec la plus grande sobriété. Chez The Delano Orchestra, ce serait plutôt le contraire. Le premier effort du groupe mené par Derek Delano, baptisé A Little Girl, a Little Boy, and all the Snails They Have Drawn - que l'on abrègera pour plus de commodité en A Little Girl, a Little Boy - ne manque pas d'attirer la curiosité. Et pas seulement grâce à son titre à rallonge, heureusement. Elégant, raffiné et cotonneux, il ne tarde pas à envelopper son auditeur dans une brume ouatée propice à la rêverie et aux épanchements lacrymaux.
A little girl, a little boyHeureusement (encore une fois), pas de larmoiements inutiles ici : si les glandes lacrymales entrent en action, ce ne sera que sous le coup de la majesté et de la délicate émotivité qui se dégage des fines architectures musicales ciselées par ce drôle d'orchestre. Et il faut bien avouer que dans cet ordre d'idées, le premier titre de l'album (si l'on excepte la jolie intro parfaite pour se mettre dans le bain), Frozen Lake, frappe fort. Très fort, même. Une amorce toute en douceur et en dépouillement, et une montée en puissance progressive à vous faire dresser les poils de la nuque et frissonner d'émotion, pour atteindre des sommets de post-rock contemplatif survolés par une voix cotonneuse et angélique : quatre minutes et six secondes de bonheur suspendues en apesanteur. Quel dommage que l'album ne soit pas entièrement de cette trempe ! Non pas que les autres titres soient mauvais, loin de là, mais voilà : quand un disque commence de cette manière, on est presque déçu qu'il ne se termine « que » bien.
Arrache-coeurMettons cependant notre déception de côté et soyons honnêtes. Du talent et de la sensibilité, cet album en a à revendre, et les formes sous lesquelles ils se déclinent sont aussi diverses que délectables : ballades aux guitares acoustiques effleurées et voix murmurées (Say We Are), interludes presque sautillants (Between Day & Night), complaintes accompagnées au piano qui fendraient les cœurs les plus durs et insensibles (I Miss a Bird, qui se paye le luxe d'une très belle montée fiévreuse presque avortée), le tout dans un écrin de pop folk toute en rondeurs, parfois striée d'éclats électriques, de cuivres luisants et de flûtes frémissantes. Alors certes, chaque titre n'atteint pas les sommets d'intensité de Frozen Lake, mais la très forte cohérence de l'ensemble, l'humeur profondément mélancolique et caressante qui se dégage de ces courtes mélodies, l'introspection presque religieuse qui plane sur tout l'album émeuvent et attendrissent.
Assaisonné de quelques fantaisies qui le gardent de l'ennui (l'incursion de l'orchestre baroque, les petits bruitages et craquements d'introduction...) et conclu par un titre dominé par une trompette langoureuse qui n'est pas sans rappeler celle d'un certain Beirut, A Little Girl, a Little Boy est une petite pépite à la fois exquise et inattendue. Un petit plaisir plein de douceur à s'auto-prescrire pour s'isoler, l'espace d'un instant, des innombrables tracas que recèle ce monde de brutes.
The Delano Orchestra - A Little Girl, a Little Boy, and All the Snails They Have Drawn
01. ...
02. Frozen Lake
03. Spread Our Little Wings
04. Between Day & Night (Part I)
05. Kill Me Twice
06. A Merry Go Round
07. Say We Are
08. Between Day & Night (Part II)
09. I Miss a Bird
10. Lucky Star
11. Bubbles of Soap
12. An Idea to the End
13. Little Girl
14. ***