Armstrong (Craig) - As if to nothing
Musique / Critique - écrit par Filipe, le 02/07/2002 (
Craig Armstrong. Plus qu'un simple compositeur, un artiste à trois facettes capable... de tout.
Il est d'abord un "Classical Composer", au même titre que d'autres grands noms à consonance allemande ou autrichienne. Lui est écossais et son parcours ne se commente pas : il étudie à la Royal Academy of Music de Londres de 1977 à 1981, passe par le London Contemporary Dance Theatre et le Tron Theatre, imagine des morceaux pour des pièces de théâtre telles que Macbeth ou The Broken Heart (jouée alors par la Royal Shakespeare Company) et passe ensuite le plus clair de son temps à composer des oeuvres orchestrales et à les interpréter entre Londres et Glasgow.
L'originalité du travail de Craig Armstrong réside dans le fait que ses morceaux sont particulièrement expressifs. Un peu à l'image de Angelo Badalamenti, qui composa l'environnement musical de la série Twin Peaks et du sensationnel Mulholland Drive, Craig Armstrong est de ces compositeurs qui prennent leur temps pour instaurer un univers émotionnel richement élaboré. Sa vision de la musique intéresse naturellement Hollywood et ses réalisateurs qui savent l'importance des bandes originales. Ainsi Craig Armstrong arrangea les musiques de Mission Impossible, Batman Forever et Goldeneye avant d'écrire celles de Romeo & Juliet, Bone Collector, Plunkett & Macleane, Le Baiser Mortel du Dragon et de Moulin Rouge, pour lequel il reçut au passage un Golden Globe. Rien que ça.
Reste que Craig Armstrong est également l'arrangeur du groupe Massive Attack, et qu'il est l'auteur d'un somptueux album qu'il ne doit qu'à lui : The Space Between Us. Moi, je vais vous parler de As if to Nothing, parce qu'il le faut. J'en ai besoin. Vous en avez besoin.
As if to Nothing est vraiment plus qu'un simple album. Et une seule écoute permet de juger du contenu. 15 titres, 70 minutes de bonheur intense pour ceux qui sauront apprécier le travail effectué par l'artiste. Une oeuvre, des mélodies en tout genre, souvent teintées de mélancolie, voire de détresse. L'album est un arrangement d'instruments classiques -violes, violons, violoncelles, basses, pianos- sans oublier une grande chorale et les différents artistes qui ont offert leur voix : Mogwai, Photek, Evan Dando mais surtout le célébrissime Bono, le leader de U2.
Au final, l'oeuvre est somptueuse. Elle est ordonnée. Elle est limpide. Elle est gracieuse. Elle n'est pas imitable. La douceur des accords, la simplicité des mélodies, la sincérité des paroles... Ruthless Gravity ou son étrange mélange électro-classique, Wake up in New York ou la voix rauque et envoûtante de Evan Dando, Miracle ou l'ampleur orchestrale omniprésente conduite par Cecilia Weston, Finding Beauty ou même la tristesse est belle, Waltz ou l'accent germanique inimitable de Antye Greie-Fuchs, Hymn 2, ou le timbre d'opéra de Photek... et puis tous les autres. Avec un coup de coeur, tout de même : Stay ou Bono doit de rappeler du temps où il interprétait With or without you au micro devant des centaines de couples enlaçés et ou Craig Armstrong et la chorale se surpassent pour nous offrir le plus joli des spectacles romantiques.
A vue d'oreille, un chef-d'oeuvre. Ni plus ni moins.