Within Temptation - Mother Earth
Musique / Critique - écrit par Danorah, le 08/07/2005 (Tags : album earth temptation mother within livraison metal
4 décembre 2000. Une date que tout fan de metal atmosphérique qui se respecte se doit de connaître, puisqu'elle marque la sortie du mémorable Mother Earth, second album et unique chef d'oeuvre des néerlandais de Within Temptation. Cet album n'est pas un coup d'essai : il prend place dans la discographie du groupe après un EP, The Dance, et un album, Enter, qui ne présentent pas d'intérêt majeur, la faute principalement à une voix death omniprésente et plutôt dérangeante, à des instrumentations trop lourdes et oppressantes et à des compositions trop répétitives (exceptées quelques perles comme Restless ou Pearls Of Light). Mais voilà. Avec Mother Earth, les membres de Within Temptation semblent avoir pris conscience que leur point fort est leur chanteuse, Sharon Den Adel, et que celle-ci mérite d'être davantage mise en avant. Exit donc l'ennuyeuse voix death des débuts, la voix aérienne et cristalline de Sharon se suffit largement à elle-même. Autant le dire tout de suite, sans Sharon Den Adel, Within Temptation ne serait rien.
Qu'est-on en droit d'attendre d'un album de metal atmo ? Des mélodies aériennes, des compositions complexes, des guitares lourdes mais planantes, des instruments dits « classiques » (le mieux étant encore un orchestre symphonique au grand complet), ainsi qu'une voix féminine de préférence légère et diaphane. Jusque là, tout va bien, Mother Earth satisfait tous ces critères. La plupart des chansons sont de véritables modèles du genre : d'une durée toujours supérieure à cinq minutes (huit minutes pour The Promise), chaque titre prend le temps de développer son thème, de créer une ambiance, et il n'est pas rare que la voix de Sharon ne fasse son apparition qu'après plus d'une minute d'exposition instrumentale. Et quelle voix ! Aigüe, cela va sans dire, mais surtout terriblement versatile et aérienne (au contraire des voix d'opéra comme celle de Tarja de Nightwish) : Sharon ne mise pas sur la puissance vocale mais sur les nuances, adaptant son timbre à l'humeur de chaque morceau, tantôt caressant, tantôt agressif, parfois vibrant d'émotion ou de colère, toujours très clair mais jamais surfait. Non contente d'être dotée d'une voix hors normes, Sharon est capable de la mener où bon lui semble, et de donner à son chant un relief impressionnant. Et même lorsque sa voix se fait grinçante, on s'aperçoit rapidement que ce n'est que pour mieux s'harmoniser avec les paroles (« I'll make them bleed down at my feet », articulé de manière absolument terrifiante, dans le vengeur The Promise). Des paroles surprenantes, qui ont le mérite de ne pas tomber dans la niaiserie ni dans la banalité : le thème principal est celui du pouvoir de la nature et de la relation de l'homme avec celle-ci (Mother Earth, Never-Ending Story, In Perfect Harmony), sans pour autant que ne soient omis le registre fantastique et les personnages magiques (Ice Queen, Dark Wings).
De tels atout ne seraient rien cependant si la qualité musicale ne se faisait pas sentir, mais là encore il n'y a pas motif à se montrer insatisfait : les compositions, tout en laissant la part belle aux cordes, parviennent à trouver un très bon équilibre entre électrique et acoustique. Les passages calmes et aériens (on sent des influences celtiques à travers les lignes de flûte et de violon) s'alternent gracieusement avec ceux, plus puissants, où les guitares se font lourdes et abrasives, et ce tout en restant infiniment élégantes. Aux titres « classiques » comme Ice Queen ou Dark Wings, à la construction rigoureuse, s'ajoutent des morceaux à la structure plus complexe, très variés, comportant souvent plusieurs thèmes différents, à l'image de The Promise (certainement le meilleur titre de l'album pour son ambiance très travaillée), Caged ou encore Deceiver Of Fools. N'oublions pas les morceaux plus calmes qui sont eux aussi des réussites totales : Our Farewell, power-ballad émouvante, Never-Ending Story et son piano entêtant, et même In Perfect Harmony et ses chants d'oiseaux, cependant peut-être un peu trop candide. La musique de Within Temptation parvient à allier des instruments classiques présents mais pas trop envahissants (gare à l'effet « soupe ») et une puissance propre au metal, et c'est cet équilibre si précaire qui lui donne tout son relief.
Un mot sur les deux titres bonus que l'on peut retrouver au fil des différentes rééditions : World Of Make Believe et Bittersweet ne sont pas les morceaux les plus énergiques de Within Temptation, loin s'en faut, mais le premier se montre divertissant (les paroles, très jolies, sont une fois de plus tournées vers la magie et la féerie) tandis que le second est d'une fraîcheur et d'une mélancolie touchantes.
Si l'album est doté d'un artwork détestable (même après de nombreuses rééditions), on se consolera en admirant en concert le physique avantageux de Sharon, mis en valeur par des « robes de princesse » magnifiques (la féerie est un élément incontournable du groupe), et la maîtrise vocale dont elle fait preuve, éclipsant presque les autres membres de la formation (qui pourtant sont loin de démériter).
Avec Mother Earth, Within Temptation est à l'origine de l'un des meilleurs albums de metal atmosphérique - voire même le meilleur. Tout est réuni pour faire de celui-ci l'album idéal : ambiances, instrumentations, voix, paroles... rien ne manque à l'appel et c'est tout simplement 54 minutes de bonheur que procure cet album à tout amateur de musique puissante et envoûtante. Un premier album magistral, qui laissait présager le meilleur pour les années à venir...
Within Temptation - Mother Earth
01. Mother Earth
02. Ice Queen
03. Our Farewell
04. Caged
05. The Promise
06. Never-Ending Story
07. Deceiver Of Fools
08. Intro
09. Dark Wings
10. In Perfect Harmony