Tahiti 80 - Interview

/ Interview - écrit par Vincent.L, le 11/12/2005

Tags : tahiti album groupe disque musique xavier pop

Interview de Tahiti 80

Quelques minutes avant leur prestation du soir, les cinq membres de Tahiti 80 nous accueillent sympathiquement dans la loge du Point FMR à Paris.

Krinein : Comment définissez-vous le style du dernier album ?
Xavier Boyer [chanteur de Tahiti 80] : Ca reste toujours des pop songs mais arrangées de manière un peu différentes. On a un peu plus poussé le côté rythmique, ce qui a pour conséquence que les titres tendent plus vers la soul, aussi bien ancienne que moderne.

K : A ce propos, quelles ont été les influences de cet opus ?
X.B : Ce sont des influences qui ont toujours été là dès le premier album [ndr : Puzzle en 1999]. Les Beetles tout d'abord, dans une exigence pour l'écriture et les arrangements. Pour nous, c'est l'école de base, les fondations. Après, sur chaque album, on a des influences assez diverses. On a toujours eu une influence soul. Même sur Puzzle, il y avait des morceaux comme Heartbeat qui étaient des morceaux plus dansants. Cette fois-ci, on a essayé de faire un album qui se rapproche de cette direction musicale. On a essayé de mettre au même niveau la mélodie et les arrangements rythmiques. Après les influences, ça peut être Outkast et Nerd.

K : Justement, quel rôle ont joué les ingénieurs du son d'Outkast et Nerd dans l'enregistrement de l'album ?
X.B : Ils ont eu deux rôles différents. Par exemple, on a juste eu par téléphone Serban Ghenea, l'ingénieur du son de Nerd. Il a mixé l'album mais n'a pas du tout touché à la production. On enregistrait à Los Angeles et lui mixait sur la côté Est [ndr : des Etats-Unis]. Nous on était fans des disques qu'il mixait et surtout du son des disques sur lesquels il travaillait. On trouvait que ça sonnait très moderne, très puissant. L'album de Nerd par exemple, In Search Of, on trouve que c'est un album où il y a de très bonnes chansons qui sonnent d'une manière originale. On a pas l'habitude d'entendre les chansons sonner comme ça donc c'est pour ça qu'on a bossé avec lui.
Avec Neal Pogue, l'ingénieur du son d'Outkast, on a sympathisé. Il est venu nous voir au studio et donc en fait, on a fini l'album avec lui. On s'est vus sur une période assez courte, même pas une quinzaine de jours. Mais il a eu un apport assez important parce qu'en fin de disque, on était fatigués. Il nous a dit qu'il trouvait que parfois on faisait un peu dans la demi mesure et qu'au contraire on devait y aller à fond. Il nous a encouragé a faire tous les arrangements rythmiques qu'on voulait, c'est-à-dire utiliser plus de percussions. Lui, il joue du tambourin et une cloche de temps en temps. Sa contribution a plus été au niveau des harmonies vocales. Finalement, c'était très surprenant car ça n'était pas du tout ce à quoi on pouvait s'attendre en travaillant avec quelqu'un comme lui, producteur de hip-hop et de RnB. Bien sur, comme Serban Ghenea, c'est quelqu'un qui a une science du mix qui est différente du mix de rock classique. Depuis Neil Pogue a bossé avec Stevie Wonder sur son dernier album.

K : Pourquoi avoir intitulé votre album Fosbury ? Est-ce lié au célèbre athlète américain ?
X.B : Oui c'est lié à l'athlète. On est tous de grands sportifs. Regardez Sylvain [ndr : Marchand, batteur du groupe] par exemple.
Sylvain Marchand (debout, montrant son ventre) : Y'a qu'à voir ma stature
X.B : En gros c'était pour l'histoire de cet homme qui a découvert et travaillé son style, et qui est arrivé aux Jeux Olympiques avec une nouvelle façon de sauter. Je pense qu'il a du braver pas mal de moqueries. Les gens devaient lui dire : « T'es fou, tu vas te tuer ». C'est un exemple. Nous on l'a aussi un peu pris comme une métaphore musicale. Toujours mettre la barre un peu plus haute... On trouvait que ça collait avec la démarche que nous avions sur notre disque : essayer de totalement changer notre façon de fonctionner. D'habitude c'était très écrit et là on est juste arrivés avec quelques idées. On voyait les choses au jour le jour ; une façon de travailler qui nous semblait impensable sur l'avant dernier album [ndr : Wallpaper For The Soul en 2002]. C'est ça qui nous plaisait, c'était de prendre des risques artistiques et de voir comment ça se passait. Dans le cas de Fosbury, ça c'est plutôt bien passé puisqu'il a eu la médaille d'or. Tout le monde maintenant fait comme lui.

K : Pourquoi écrivez-vous majoritairement des chansons musicalement joyeuses ?
X.B (en blaguant) : Parce qu'on est des gens très drôles, très sympas. Y'a une ambiance de folie ici, regardez(les membres du groupe lancent un bruyant « Oooou » et applaudissent timidement). Je pense que c'est lié aux caractères de chacun. S'il on doit caricaturer, c'est vrai qu'on était plus fans de Pet Sounds [ndr : des Beach Boys] que de Pornography des Cure. Je pense qu'il y a une certaine mélancolie dans nos morceaux mais c'est vrai qu'on est pas dans le pathos, la tristesse et le désespoir complet.

K : Envisagez-vous un jour de chanter une ou deux chansons en français ?
X.B : Si jamais on faisait une reprise ça serait de Pierre Vassiliu ou de Michel Polnareff. La Mouche de Polnareff et En Vadrouille à Montpellier de Vassiliu: un très grand morceau.
K : Et en japonais ?
X.B : J'ai toujours pas reçu ma feuille d'impôts. J'attends de voir comment ça se passe. Si vraiment le montant est trop élevé...
Sylvain Marchand : on va apprendre le japonais
X.B : ... je pense qu'on ferait un morceau en japonais. Pour l'instant c'est pas encore d'actualité.

K : D'autres groupes français tels Phoenix, Syd Matters, Ginger Frolic ou encore M83 chantent en anglais. Les écoutez-vous ?
X.B : M83, je connais pas. Ginger Frolic, absolument pas. Concernant les deux autres, on a joué avec Syd Matters et pour Phoenix, on se connaît par disques interposés. On voit ça comme des preuves de la vivacité de la scène musicale française. De la même manière qu'il y a une scène suédoise et flamande très vivace... Ce qui est parodoxal, c'est qu'il n'y a aucun mouvement. Ce sont des trucs spontanés. Y'a aussi Fugu qui joue souvent avec nous. Nous on a produit son deuxième album. Mais avant ça on a produit nos disques chacun de notre côté. C'est comme Calc [ndr : la première partie du concert ce soir là]. Y'a pas de filiations particulières mais après, à l'étranger, ça fait un petit mouvement. Une scène un peu respectable où les gens sont ouverts.

K : Plus globalement, qu'écoutez-vous en ce moment ?
X.B (après quelques secondes de réflexion) : Scalde là, par exemple, qui joue en ce moment, c'est vachement bien. On écoute aussi des titres assez anciens comme par exemple The Mamas and The Papas, l'album People Like Us ou encore des titres brésiliens. C'est toujours assez large.

K : Que pensez-vous du téléchargement légal de musique ?
X.B : Bah c'est bien, pourquoi pas. Je crois que malheureusement on va pas y couper.
Pedro Resende [ndr : le bassiste du groupe] : Tant que c'est légal, c'est bien. Nous on a l'habitude des disques mais y'a toute une génération qui téléchargera. Mais bon après, c'est plus la peine de faire des pochettes.
Méderic Gontier (guitariste) : C'est la fin du format, y'aura plus d'albums.
Sylvain Marchand : On dématérialise la musique donc à partir de là...
Pedro Resende : Tu pourras sortir un titre par semaine, t'auras pas besoin de sortir un album en fin de compte.
Méderic Gontier : T'achèteras que des chansons. Les mecs ils veulent des chansons, ils veulent plus d'albums.

K : Pourquoi cet amour pour les pandas ? Sur la pochette, le site...
X.B : Si tu savais ce qu'il y a dans le sac la bas...

K : Un petit déguisement ?
X.B : ... plusieurs
Pedro Resende  : Pandas, pandas. Parce que y'avait que ça dans la truc de location qu'on avait pris. Ca aurait pu être une grenouille ou un lapin. Et sur le coup ça a été un panda. Je t'assure que c'est ça.

K : Qu'avez-vous prévu pour 2006 ?
Sylvain Marchand : Y'a des concerts...
Méderic Gontier : ... l'album doit sortir en Espagne, Allemagne, Angleterre...
Pedro Resende : Développer un peu plus la production parce qu'on y a pris goût avec Fugu. On fait pas mal de remixes aussi donc développer ça de la même manière. Voilà pour 2006 et 2007 aussi je pense.