The Streets - Original Pirate Material
Musique / Critique - écrit par Kassad, le 03/08/2004 (
L'Angleterre est la terre d'élection de la pop musique. Depuis les Beatles jusqu'à Muse, en passant par New Order, Blur ainsi que d'innombrables groupes impossible à lister ici, il n'est pas une génération qui n'ait engendré de groupes emblématiques. La scène britannique hip-hop est quant à elle moins connue. Concernant le rap elle est carrément absente les US occupant fortement le terrain. Un choix oscillant entre la version côte ouest, avec bimbo, grosse voiture et bijouterie clinquante à la clef ou bien une version côte est plus hardcore, plus noire : le rap du ghetto. Original pirate material de The streets a donc tout pour vous étonner. Entendre un rappeur avec un accent britannique à couper au couteau est suffisamment étonnant (il paraît même qu'on entend bien qu'il est de la banlieue Londonienne, mais j'avoue ne pas en être là), si en plus vous ajoutez des mélodies danse/garage originales et des textes quasi-métaphysiques le résultat que vous obtenez est un véritable OVNI musical.
La première comparaison qui peut venir à l'esprit est celle d'Audio Bullys (les titres Too much brandy et Don't mug yourself notament), et effectivement ces derniers semblent avoir été fortement influencés par The streets, mais elle ne convient pas vraiment. Si dans les formes les deux groupes peuvent présenter des caractéristiques communes il n'en est pas du tout de même concernant le fond. La tonalité générale de Original pirate material, est beaucoup plus triste voire nostalgique. Ce n'est pas ici que vous trouverez de posture rageuse, dédaigneuse des rappeurs qui "ont la haine" et pas grand chose d'autre à mettre en avant. La piste It's too late est bien représentative de cet état d'esprit, elle illustre aussi parfaitement cette capacité des Streets à rendre légère la misère la plus noire. Il y a un certain parfum de Trainspotting qui se dégage de cet album. Les chansons Weak become heroes et Turn the page sont les plus réussies de ce point de vue. De ces textes ainsi que des musiques se dégage aussi une impression d'inéluctabilité, de force tranquille. Par exemple dans Weak become heroes, à propos des"free party" et du phénomène musique électronique (avec tout ce qui l'entoure si vous voyez ce que je veux dire), cette réflexion emprunte de mélancolie devant la vie qui file entre les doigts : "then the girl in the cafe taps me the shoulder. I realise five years went by and I'm older ... the world stands still as my mind slashes around".
Que dire de plus ? Que la conclusion de Turn the page conviendrait parfaitement à la scène finale de La ligne rouge. La vie, la joie sont éphémères mais elles sont là. Chaque jour nous rapproche un peu plus de nos derniers instants, mais la vie vaut la peine d'être vécue ne serait-ce que pour contempler ces joyaux dont Original pirate material n'est pas le moindre.
" Once more before the law judges over all of us
Cos in this place you'll see me
Brace yourself, cos this goes deep
I'll show you the secrets the sky and the birds
Actions speak louder than words
Stand by me my apprentice
Be brave, Clench fists."