7/10Jesu - Lifeline

/ Critique - écrit par Aenem', le 26/01/2008
Notre verdict : 7/10 - Escapades éthérées (Fiche technique)

Tags : lifeline jesu rock chronique metal album head

Lifeline de Jesu dévoile dans ce mini cd 4 titres un visage toujours plus expérimental et ouvert de Justin Broadrick et de son metal atmosphérique planant. Court mais profondément intense, une fois de plus.

Enregistré pratiquement en même temps que Conqueror, Lifeline de Jesu poursuit le travail de déconstruction de l'unité musicale de Justin Broadrick avec son projet actuel et tente de faire plaisir à ses amateurs avec ce mini EP de 4 titres en proposant des morceaux qui n'auraient pas pu figurer sur Conqueror déjà passablement long.

Invitant quelques amis à la fête, notamment Aaron Turner d'ISIS, réalisateur de la magnifique pochette avec ce phare tout en teintes sépia, au cachet vieux style même s'il est en contradiction avec le titre, l'image est à la ressemblance du disque, une vision de plus en plus ouverte musicalement.

Présente également sur le disque, Jarboe, l'ex chanteuse des Swans qui l'accompagne sur le titre Storm Comin' On écarté de Conqueror d'ailleurs, mais qui trouve sa place ici.

Justin Broadrick et Ted Parsons
Justin Broadrick et Ted Parsons

Renaissance

Résolument plus ouvert que jamais dans son approche auditive, Lifeline va prolonger l'expérience Conqueror en continuant le travail de défrichage de ce son à mi-chemin entre les masses lourdes de guitares et les nappes légères donnant toujours cet aspect aérien aux morceaux tout en y voyant désormais se greffer d'autres sons à la texture océanique, organique, comme si l'on ressentait une vague d'apaisement intérieur.

Lifeline, ouvre ainsi donc des nappes atmosphériques à l'odeur d'océan vous frappant au visage. Dès les premières secondes l'impression d'être en territoire connu va céder place à une lente propagation de bonheur intérieur simple et accueillant pour qu'on se laisse emporter assez facilement par le groove puissant et sous latent du titre.

Le morceau semble ne tenir à rien ou si peu en termes de composition, d'arrangements, mais quelque chose de profondément serein s'en dégage, un sentiment de force très puissant, et évoluant librement sur 5 minutes 30, où des guitares accompagnées d'un piano léger vont se fondre et se confondre jusqu'à plus soif. Le ressentiment qui se confirme de la douceur d'un tel morceau se retrouve d'ailleurs sur les paroles signées d'une sincérité troublante: «Them at all anymore, What you need is not what you are...So let it go and follow yourself».
Broadrick règle-t-il partiellement ses comptes avec ceux qui l'accusent de devenir de plus en plus pop, loin des territoires de feu Godflesh et ainsi plus ouvert dans son approche? Peu importe au final, le résultat est d'une beauté édifiante.

You Wear Their Masks va lui jouir d'une vibration continue, mimétisme troublant presque du premier morceau mais s'agrémentant d'un son à mi chemin entre un folk saturé d'effets et nimbé d'une largeur de plaisir auditif offert par des sons qui se déversent peu à peu dans une torpeur continue, rejetant une fois de plus l'auditeur sur les rives s'étendant à perte de vue de Jesu. Storm Comin' On va par contre brusquer les fans les plus intégristes c'est une certitude. A mi chemin entre un metal folk pop remixé et malaxé version Broadrick, l'appui de Jarboe est discutable.
D'une part le chant un peu exagéré dans sa forme devient vite assez ennuyeux, d'autre part l'exagération de l'intonation par moments fait que le titre se pare d'attributs un peu prétentieux. Collaboration un peu décevante pour deux artistes cultes attendus au tournant, c'est un bonus sans doute plus qu'une véritable collaboration. Est-ce pour cette raison que le perfectionniste de Broadrick a empêché celui-ci de figurer sur Conqueror? Reste une deuxième partie du titre revenant un peu sur les territoires du premier album éponyme. A voir sur la future collaboration réelle prévue pour mars ce que le duo fera concrètement.

La clôture d'album se fera au rythme de End of the Road reprenant toujours le même schéma: basse lancinante, voix noyée volontairement dans le mix final, masse de son saturée qui s'ouvre peu à peu grâce à des nappes introduites par des claviers eux aussi, en suspension, avant de disparaître évanescente dans les airs.

Chemins de traverse

Trois titres plus que sympathiques sans révolutionner l'opus précédent, 1 titre moyen, Lifeline ne prétend pas révolutionner le style musical sur lequel s'est fixé actuellement Broadrick. Il n'est qu'un bonus agréable à ceux pour qui Conqueror aurait pu sembler presque court.

Intéressant dans la démarche, lançant partiellement qulelques pistes sur lesquelles la suite de Jesu va s'imposer, Lifeline est une récréation musicale apaisante, douce et sereine, ce qui en l'état n'est déjà pas si mal.
index2_250.
Jesu perdus sur la plaine?

Trop mou diraient certains? On ne pourra pas leur reprocher de critiquer qu'un peu trop de Jesu en 2007 a partiellement bridé la créativité au détriment partiel, de la quantité. Mais ça reste au dessus du lot des nombreuses sorties metal de ces derniers mois tout de même.
Espérons tout de même que la suite proposera un peu de renouvellement tout de même.

 

Jesu - Lifeline
01. Lifeline
02. You Wear Their Masks
03. Storm Comin' On
04. End of The Road