8/10Bénabar - Reprise des négociations

/ Critique - écrit par Filipe, le 05/11/2005
Notre verdict : 8/10 - Reprise des ventes ! (Fiche technique)

Tags : benabar violin musique album piano engineer partitions

Dans ses chansons, il nous surprend, nous émeut, nous captive, nous amuse. Pourtant, il ne fait qu'évoquer des petits riens de la vie de tous les jours, sans trop user d'effets de style. Les rimes, il les laisse à d'autres. Lui se contente d'être naturel et sincère. On le compare souvent à un Joe Dassin ou un Michel Delpech. Le fait est que son côté "Français moyen" le rend terriblement attachant. Il fait preuve d'une crédibilité sans faille auprès du public. Pourtant, ce "De Funès de la chanson" a la notoriété discrète. Il faut dire qu'avec Les Risques du métier, album paru en 2003, Benabar est devenu l'un des meilleurs vendeurs de la chanson française. On parle de plus de 500 000 exemplaires écoulés. Il y avait bien là de quoi se pavaner ! Mais il est bien connu que la carrière d'un artiste est une succession de hauts et de bas. Un peu comme les histoires qu'il nous raconte à travers ses chansons. Alors, Benabar préfère aller de l'avant sans trop se soucier des chiffres. Il préfère évoquer son "évolution artistique". La formule est un peu trop solennelle pour évoquer le parcours de quelqu'un d'aussi "terre à terre". Encore que. Pour son nouvel album, Reprise des négociations, il ne s'est pas contenté de réemployer des formules les yeux fermés. Même si la forme est pratiquement identique à celle de ses prédécesseurs (mêmes intonations, mêmes plaisanteries), le fond a totalement été remanié.

L'album conserve ce style qui rendait ses prédécesseurs si séduisants. Les paroles sont toujours aussi surprenantes et pleines d'inventivité. Benabar a une nouvelle fois su tirer profit de son imagination débordante pour nous concocter de petites chroniques musicales toutes plus délirantes les unes que les autres (Bruxelles). Les histoires de couple l'intéressent toujours autant, qu'il soit question de leurs choix immobiliers (Quatre murs et un toit) ou de leurs soirées en tête-à-tête avec le petit écran (Le dîner). Souvenir de trentenaire oblige, il rend aussi un hommage vibrant aux shows pailletés "façon seventies" (Maritie et Gilbert Carpentier). Et puis, c'est en jeune père de famille qu'il s'est également attaché à la composition d'une petite berceuse pleine d'humour et de tendresse (La berceuse), pour accompagner bébé au pays des rêves. Une façon très à la mode (Corneille et Obispo ne me contrediront pas) de personnaliser encore un peu plus ce quatrième opus.

Mais l'optimisme chez Benabar, "c'est pas automatique". D'autres titres prennent une tournure un peu plus singulière. Ceux-là se caractérisent par des textes plus sombres et un timbre de voix plus éploré. Le piano accentue la mélancolie qui se dégage de certains d'entre eux (Triste compagne). Globalement, les orchestrations sont plus élaborées et les instruments bien plus nombreux qu'auparavant (près d'une vingtaine de variétés différentes, si l'on se réfère au livret qui accompagne le disque). D'un seul souffle, Benabar évoque la pauvreté, l'exclusion sociale, le mensonge et la solitude (Qu'est ce que tu voulais que je lui dise ?). Il revient de façon très ironique sur l'individualisme grandissant de nos sociétés (Tu peux compter sur moi) qui, comme chacun le sait, conduit à l'isolement de tout un chacun. Même si ses portraits musicaux sont un peu plus amers qu'à l'accoutumée, il ne dissimule pas bien longtemps ses penchants pour l'ironie, la dérision et le second degré. Benabar essaie toujours de voir les choses du bon côté, même lorsque les occasions ne s'y prêtent pas vraiment (il n'arrive décidément pas à se défaire de ce réflexe), si bien que l'on oscille constamment entre le rire et les larmes. Ce n'était pas tant le cas sur Benabar ou Les Risques du métier. Ainsi, lorsqu'il évoque les malheurs d'un homme récemment licencié, divorcé et privé de la garde de ses enfants, il ne peut cesser de l'imaginer en méchant de James Bond, souhaitant à tout prix "menacer la planète" et "soumettre le monde" (Le méchant de James Bond). Dans un même ordre d'idée, il y a aussi l'histoire de cet homme, qui est pris d'un fou rire en pleine cérémonie d'enterrement, et qui est ensuite envahi de remords (Le fou rire).

Avec cette Reprise des négociations, Benabar est parvenu à faire évoluer son répertoire et son image avec beaucoup d'intelligence. Il a su aborder des thèmes plus sensibles, tout en restant fidèle à ce qui faisait le charme de ses précédentes réalisations (La P'tite monnaie, Benabar, Les Risques du métier). Les textes sont une fois de plus irréprochables. Chaque nouvelle tournure de phrase est aussi soignée que la précédente. Il trouve toujours les mots justes pour faire passer les sentiments les plus divers. Et puis, il s'appuie désormais sur des mélodies un peu plus fouillées qu'auparavant. La voix est un peu moins mise en avant, même si elle demeure l'attraction principale de ce disque. Et ça, il n'y a pas de raison que ça change !


01. Le dîner
02. Maritie & Gilbert Carpentier
03. Quatre murs et un toit
04. Bruxelles
05. Triste compagne
06. La berceuse
07. Les épices du souk du Caire
08. Qu'est ce que tu voulais que je lui dise ?
09. Le méchant de James Bond
10. Le fou rire
11. Tu peux compter sur moi
12. Le cahier de solfège